Guérisseuses
Brenda Lozano
- roman
- 21,50 € | 288 pages
- parution le 13 mars 2025
- ISBN 978-2-4876-0029-4
Zoe, jeune journaliste, se rend à San Felipe, une région reculée du Mexique, pour écrire un article sur Feliciana, une vieille femme dont les talents de guérisseuse attirent écrivains, cinéastes et millionnaires du monde entier. Sans le vouloir, elle est devenue la guérisseuse la plus légendaire de tout le Mexique. Mais Feliciana ne s’intéresse ni à l’argent ni à la célébrité. Avant de livrer sa propre histoire, elle veut entendre celle de Zoe.
Deux femmes. Deux voix. Deux vies. Le Mexique ancestral, rural et magique, et le Mexique urbain au rythme effréné se prennent par la main dans ce roman extraordinaire qui parle avec beaucoup de délicatesse de l’identité féminine et de la façon dont les femmes apprennent à se connaître pour mieux se reconnaître, guérir leurs blessures et trouver leur propre voie.
- Une immersion fascinante dans un monde méconnu, écrite avec tendresse et humanité. Un des meilleurs livres de fiction de l’année.Ce livre rappelle l’échec répété du monde à contrôler le pouvoir féminin et la pure magie du langage lui-même. Une histoire passionnante et passionnée sur des secrets à la fois sacrés et profanes.Ce livre fait la chronique de la violence à l’encontre des femmes mais met en parallèle en lumière une histoire de liberté et de puissance.
- L’écrivaine mexicaine Brenda Lozano, est sans doute la voix la plus singulière que j’aie rencontrée cette année dans le domaine de la fiction. Le récit de Feliciana, qui raconte sa vie de guérisseuse indigène - ou chamane - est hypnotique, elliptique et tout à fait captivante. Son histoire se mêle à celle de Zoe, une journaliste de Mexico envoyée pour faire un reportage sur la mort de Paloma, la cousine muxe - ou du troisième sexe - de Feliciana. Leurs histoires se combinent pour mettre en lumière les luttes des femmes qui s’efforcent d’être fidèles à elles-mêmes et de trouver leur propre voix
Il était six heures de l’après-midi quand Guadalupe est venue me dire On a tué Paloma. Je n’ai pas la mémoire des heures ni des années, je ne sais pas quand je suis née parce que je suis née comme est née la colline, allez donc demander à la colline quand elle est née, mais je sais qu’il était six heures quand Guadalupe m’a dit On a tué Paloma pendant qu’elle se préparait avant de sortir, je l’ai vue dans sa chambre, j’ai vu son corps par terre et ses ombres à paupières répandues sur ses mains, dans le miroir elles étaient deux et toutes deux avaient du fard sur les mains, comme si Paloma venait d’en appliquer sur ses yeux, comme si elle avait pu se lever pour m’en mettre à moi aussi.
Paloma avait aimé de nombreux hommes qui ne l’avaient pas aimée en retour et de nombreux hommes qui lui avaient rendu son amour, et beaucoup sont venus assister à sa veillée pareille à une voile. Ma sœur Francisca et moi, nous avions Paloma du côté de mon père, c’était la seule qui nous restait de sa famille, Paloma, fille de Gaspar, le frère de mon père, lui aussi décédé. Paloma était la seule à avoir dans le sang les dons de guérisseur de mon père, de mon grand-père et de mon arrière-grand-père, c’est elle qui m’a appris ce que je sais, elle qui m’a dit Feliciana, tu es une curandera, tu as ça dans le sang. Elle m’a dit ceci se fait comme cela, cela ne se fait pas comme ceci, tu portes le Langage en toi, chérie, tu es la guérisseuse du Langage car le Livre t’appartient. Paloma a soigné quantité d’hommes qui ne l’aimaient pas et elle a dit l’avenir à quantité d’hommes qui l’aimaient, elle a guéri des tas de gens et à d’autres elle a prédit des amours florissantes ou leur a révélé les désamours qui les flétrissaient, on l’aimait pour ça, parce qu’elle excellait à donner des conseils en amour, on riait en sa compagnie et on venait la trouver parce qu’elle était bonne conseillère en amour.
La mort l’a appelée à trois reprises. La première lorsqu’elle s’est éprise d’un politicien et que la mort a pondu son œuf en elle. La deuxième quand elle a eu le béguin pour un cœur de pierre, une froideur qui a incité la mort à lui égrener ses trilles à l’oreille. La troisième a eu lieu quand elle s’est entichée d’un homme de la ville atteint d’une maladie non encore déclarée mais sur le point de l’être, alors la mort lui a chanté de façon aussi claire que le jour qu’elle viendrait la chercher à six heures du soir, et en effet Guadalupe est venue me dire On l’a tuée, elle avait du fard à paupières sur les mains et j’ai vu deux corps dans le miroir, deux corps qui avaient vraiment l’air vivants, abstraction faite de la tache de sang qui s’étendait sous elle. Mais quelle heure terrible, je me rappelle cette heure terrible. Pour moi il était six heures partout dans le monde d’aujourd’hui, d’hier et de tous les temps, et même si chaque lieu a sa pendule, son heure et sa langue, pour moi il était partout la même heure et aucune autre langue n’existait en dehors de ces mots, car Guadalupe était venue me dire On a tué Paloma. Il était six heures du soir dans l’ombre qui tombait sur la milpa au coucher du soleil, il était six heures précises lorsque le Langage m’a désertée.
- roman
- 21,50 € | 288 pages
- parution le 13 mars 2025
- ISBN 978-2-4876-0029-4
- Amour, extérieur nuit
- Après la brume
- Biographie sentimentale de l'huître
- Boa
- Carnet de phares
- Corregidora
- Demi-volée
- Histoires passagères
- Je suis une île
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